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En Bref...

  • : Ismaelita
  • : Ismaelle est une marionnette qui ne parle pas. Elle est née en France, mais son coeur est au Pérou... nous sommes donc parties toutes les deux à la rencontre des enfants d'Ayacucho, au coeur des Andes, où la vie reprend après 20 ans de guerre civile.
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D'ici et d'ailleurs

Paris-Pérou, on commence à construire un pont...

Sur cette page, des souvenirs : ceux du premier (2005) et du second (2011) séjour là-bas, principalement des découvertes de la marionnette Ismaëlle auprès des enfants et des populations quechua d'Ayacucho (Andes Centrales), mais aussi une excursion sur la côte Nord, et en Amazonie, sans oublier Cuzco et la vallée du Vilcanota...

Des projets, aussi, puisque je souhaite retourner  à Ayacucho, avec mes marionnettes. L'objectif de cette année :  m'enfoncer un peu plus dans la sierra, si possible vivre cette période dans une communauté andine, et surtout apprendre le quechua. Les choses se dessinent petit à petit, et c'est souvent en partageant les idées avec les amis d'ici et de là-bas que les ébauches prennent forme. J'ai besoin de conseils.

Et puis un peu d'actualité, puisqu'une des conséquences les plus belles de la construction de ce pont, c'est l'intérêt que les uns et les autres prennent pour el Peru en blanc et rouge. Ces derniers mois ont été l'occasion d'échanges très émouvants, autour des photos, des musiques, des témoignages des enfants. Au bout du compte, de tout cela est en train de naître un projet de spectacle qui prendra forme avec des comédiens et musiciens ici, en France, avant de lancer le pont vers l'autre rive.

 

Amigos peruanos,

Ismaela ya les está extrañando. A lo lejos, sigue caminando con ustedes, esperando el regreso. Aquí, la gente sigue pidiendo noticias de ustedes, y pasamos horas contando las miradas, las sonrisas, los silencios que compartimos. 
Había prometido recetas, cuentos, fotos etc... En esta página poco a poco les van a encontrar. 

Hasta pronto, queridos amigos del otro lado del mundo, y  como lo escriben los niños a Ismaela : “con todo cariño, chauuuuuuuuuu... ”

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Playlist Ismaelita

 

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Kusi Chakakuna

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Bientôt ici des nouvelles de l'association Kusi Chakakuna - Les Ponts de Joie (pour la coopération et les échanges d'artistes et d'artisans avec la population d'Ayacucho), qui prend tournure ! Pour être informé de l'avancée du projet, inscrivez-vous dans la rubrique "Nouvelles / Noticias" (juste au-dessus), et nous vous tiendrons au courant.

Pronto les vamos a dar noticias de la asociacion Kusi Chakakuna - Puentes de Alegria, que estamos creando, para que cooperen artistas y artesanos a la vida en las comunidades quechuahablantes de la provincia de Ayacucho (Peru). Para recibirlas, dejen su correo en el cuadro "Nouvelles / Noticias" (encima de esto), se las mandaremos.

Hasta pronto !

14 septembre 2005 3 14 /09 /septembre /2005 00:00

QUAND Y'EN N'A PLUS y'en a encore... Vous ne croyiez tout de même pas que j'allais vous laisser tranquilles déjà ? OK je vous ai  raconté le retour, mais il y a encore pas mal de choses à dire, à voir...

Comme Ismaëlle revient du Pérou avec quelques jouets que les enfants d'Ayacucho lui ont offerts, pour qu'elle s'amuse pendant que je l'emmenais en voyage dans le Nord du Pérou, je vous rapporte quelques photos des jeux que j'ai pu observer dans la cour de récré ou dans la rue...

Glissades d'écolières, mirador d'Acuchimay (Ayacucho) 

Cometa (cerf-volant)

Les jours de grand vent, les professeurs emmènent les enfants faire du cerf-volant sur l'Acuchimay, l'Apu d'Ayacucho. Ils sont tellement nombreux que le ciel est multicolore. Certains s'emmèlent, d'autres se prennent dans les fils électriques, d'autre vont voler haut, si haut que parfois ils ne redescendent plus...

Jeunes garçons jouant aux billes (daños) dans un caniveau, à Quinua, village des hauteurs d'Ayacucho (où s'est gagnée l'Indépendance du Pérou).

Titeres, petites marionnettes à doigt, en laine multicolore, que les mamas tricotent sur le marché à leurs heures perdues.

Yas (en castillan) ou Pispis (en quechua), sorte de petits osselets en plastique. Jeu de filles essentiellement. Il y a plusieurs jeux possibles, l'un d'eux consiste à lancer la balle en l'air et à ramasser le maximum de yas avant qu'elle ne retombe.

Trompos, les toupies. Un régal. Leurs toupies sont magnifiques, en bois, et leur maniement est un véritable art... Il faut d'abord enrouler le fil autour de la pointe, en remontant sur la partie en bois, puis la lancer, en criant "chasqui !". Elle tourne alors sur le sol. Ils arrivent à les attrapper en les prenant dans leur main, sans qu'elle cesse de tourner. On dit "faire danser" la toupie, et quand elle s'arrête, "elle meurt". Admirez la concentration d'Alejandro en lançant sa toupie... Je leur avais demandé de me faire une démonstration, quatre petits gars ont pris en main mon éducation, très sérieux, je n'ai pas été déçue... !

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13 septembre 2005 2 13 /09 /septembre /2005 00:00

Quelques chiffres, pour les joueurs de loto.

Superficie du Pérou : 1.285.216 km2. Oui, c’est grand.

Population : environ 24 millions. Très environ. Cette année a lieu le recensement national. Chiffre à la hausse en perspective, les familles sont très nombreuses.

Kilométrage parcouru par Ismaëlle :   un peu plus de 7400 kilomètres parcourus en 144 h 30 heures (sans compter les heures d’attente), ainsi répartis :

                 

Trajet / Date

Nb de km

Durée

Remarques

Lima – Ayacucho

30.06.05

550 km

9 h

Vendeurs de tout et Soroche carabiné

Ayacucho – Cusibamba (A/R)  

 

16.07.05

20 + 20 km

6 h

Ahhh... les pistes trouées et poussiéreuses d’Ayacucho... Enlisement du car à l’aller et chopage d’angine au retour

Ayacucho – Lima

 

Nuit du 20.07.05

550 km

8 h 30

Confirmation et approfondissement d’angine

Lima – Chiclayo

 

Nuit du 21.07.05

900 km

12 h

Avec 30 jez déchaînés : distribution de sucettes et blagues débiles

Chiclayo – Piura

 

22.07.05

250 km

4 h

Idem, on ne s’habitue pas à tant de jeunesse

Piura – Paita  (A/R)

 

22.07.05 ; 24.07.05

50 + 50 km

2 h

R.A.S. si si, c’est possible.

Piura – Chiclayo

 

25.07.05

250 km

4 h

De la vraie route bien de chez nous, la Panaméricaine.

Chiclayo – Bagua

 

Nuit du 25.07.05

300 km

6 h

Avec poinçonneur-magicien qui travaille dans un cirque quand il n’est pas poinçonneur.

Bagua – Chiriaco

 

26.07.05

50 km

5 h

En combi, piste cahotique, menace d’embuscade...

Chiriaco – Yamakaiénsa (A/R) 

 

28.07.05

10 + 10 km

3 h

Combi + peke-peke (pirogue)

Chiriaco – Jaén

 

29.07.05

50 km

5 h

En combi, non-médicalisé  avec une malade assez malade.

Jaén – Lima

 

Nuit du 30.07.05

1200 km

16 h

Avec Lady ! le trajet le plus court du séjour.

Lima – Cusco

 

Nuit et journée du 04 et 05.08.05

1000 km p’têt plus

21 h

De la route de montagne, des centaines de kilomètres de lacets.. : l’horreur

Cusco – Lima

 

Nuit et journée du 12 et 13.08.05

1000 km

20 h

Idem... Mais les paysages sont magnifiques sous la lune

Lima – Ayacucho

 

16.08.05

550 km

13 h

Panne à 5.000 m d’altitude, frayeur + soroche + vendeurs de tout

Ayacucho – Lima

 

Nuit du 25.08.05

550 km

9 h

On s’habitue… c’est tout.

 Nous avons voyagé avec Molina ; Cruz del Sur ; Civa ; Linea ; Flores ; Movil Tour ; et j’en oublie…

 

 

Le meilleur rapport qualité-prix (bus confortables, horaires respectés, pas cher) c’était Civa, mais officiellement, c’est la compagnie qui est réputée avoir le plus d’accidents (je l’ai su après). En tout cas, sur le trajet que j’ai fait, c’était impeccable.

En revanche, je suis furax contre Cruz del Sur, qui fait payer cher une différence de qualité invisible. Les sièges ne sont pas confortables, et les gens qui voyagent là-dedans sont désagréables. On paye les allures d’aéroport que se donnent leurs agences.

Molina, j’ai bien aimé. On paye pas cher du tout, on peut voyager de jour, on voyage à la péruvienne c’est-à-dire que :

-          on part une demi-heure après l’horaire prévu

-          on se fait réveiller toutes les demi-heures  (quand on avait enfin réussi à somnoler vaguement) par des vendeurs de gaseosas, de mandarinas, de canchita (pop-corn), de crème d’asticot aux herbes d’Amazonie, de dentifrice qui fait blanchir les dents etc…

-          on est coincé entre la fenêtre et une imposante mama tout sourire.

-          on tombe en panne à 5.000 mètres d’altitude.

Bref, c’est assez interactif comme concept. Pas mal !

A cela s’ajoutent quelques heures d’avion, mais au retour, après toutes les heures de bus qu’on s’est enfilées, ça a semblé presque rapide : 

Paris – Madrid – Lima : 18 h (14.000 km ? )

Lima – Madrid – Barcelone – Paris : 20 h (14.600 km ?)

Maintenant, je suis d'une patience... vous n'avez même pas idée.

Sauf pour les bus à Paris. Les combis m'avaient habituée à plus de fréquence et de régularité... !

 

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12 septembre 2005 1 12 /09 /septembre /2005 00:00

« ALGO BARBARO », comme dirait Chema, déployant la carte pour me montrer jusqu’où s’étendait la capitale, bien au-delà de ce que mon plan dégotté à la FNAC ne pouvait le laisser deviner. Bárbaro, oui c’est le mot. Des dizaines de kilomètres de cabanes précaires au Nord, au Sud, à l’Est.

Jesús Herrero, un des responsables nationaux de Fe y Alegría, m’avait proposé de m’emmener voir l’autre Lima, celle qu’on ne visite pas. Difficile de combiner nos deux emplois du temps, mais nous sommes finalement tombés d’accord pour y consacrer la dernière journée de mon séjour péruvien. Mes valises prêtes, j’attendais, intriguée, avec de vagues souvenirs photographiques de copains venus y travailler il y a quelques années. Nous prenons la voiture, et roulons longtemps, vers le Nord.

 

 

Une heure sur cette voie rapide bordée de bidonvilles qui partent à l’assaut des collines, qui colonisent le désert de sable gris. On n’en voit pas la fin, l’horizon est trop bas, trop plombé. Toujours cette impression d’être prisonniers d’une cloche grise. On sait que la mer n’est pas loin, mais l’endroit n’a rien de balnéaire. Nous passons devant l’énorme raffinerie que le Sentier Lumineux a tenté de faire exploser pendant vingt ans, en vain, heureusement.

 

Nous arrivons à Pachacutec. Il y a cinq ans, il n’y avait rien ici. Aujourd’hui on ne distingue plus les limites de la « ville ». Comme los Olivos à Ayacucho, Pachacutec est une invasión, un terrain sur lequel se sont installés dans des abris de fortune les nouveaux venus de l’exode rural. L’histoire de cette invasion est une farce grinçante. Les nouveaux arrivants, il y a cinq ans environ, s’étaient installés aux franges de Villa El Salvador, le bidonville-modèle de Lima. Peut-être en avez-vous entendu parler, l’organisation de cette municipalité est souvent cité en exemple. Cette zone est fortement politisée et était activement opposée à la dictature de Fujimori. Lorsque 10.000 arrivants sont venus coloniser les environs de Villa El Salvador, Fujimori a demandé au maire de régler le problème, tout en lui retirant tout soutien des forces de l ‘ordre. Bien évidemment, il était impossible de déloger 10.000 personnes dans un tel contexte. Fujimori a utilisé la situation pour sa propagande personnelle : prononçant le constat officiel que le maire de Villa El Salvador était incapable de fournir une solution, il a annoncé qu’il offrait gracieusement des terrains en bord de mer, au Nord de Lima, avec une piste asphaltée et l’électricité.

 

C’est ça Pachacutec. Aujourd’hui, ils sont des centaines de milliers. Et je vous décris ce que ça donne dans la réalité les belles promesses de Fujimori. Effectivement l’électricité est installée : on observe des forêts de poteaux électriques. Je ne suis jamais contente, direz-vous, mais je ne peux m’empêcher de demander si le plus urgent pour Pachacutec c’était le téléphone et internet (qui y sont) ou l’eau et le tout-à-l’égout (qui n’y sont pas). Or on est en plein désert. L’eau arrive par des camions-citernes, qui vendent l’eau aux habitants, qui la stockent dans des bidons en métal ou, dans le meilleur des cas, dans des réservoirs en briques ou en ciment. Inutile de préciser que cette eau n’est pas potable, ni qu’ainsi stockée, elle développe des saloperies. Quant à l’évacuation, représentez-vous une ville de plusieurs centaines de milliers d’habitants sans le tout-à-l’égout. Ils ne peuvent même pas se consoler avec le panorama… la mer n’apporte qu’humidité, froid et érosion, et bien qu’elle soit toute proche, on la distingue à peine à travers la garrúa. Et la route… la route « asphaltée »… J’ai cru que c’était une plaisanterie de mon compère Jesús (qui comparait les environs de Lima à l’Aragon… sans les arbres), quand il m’a dit qu’on roulait sur une piste asphaltée : mais en faisant bien attention, entre deux cahots, je me suis rendu compte qu’on pouvait effectivement distinguer quelques vestiges de route entre deux trous et sous l’épaisse couche de sable qui l’avait recouverte. Cette route a été faite en 2001, je crois : une fine pellicule de bitume sur le sable. Paradisiaque, le plan logement du père Fujimori, non ?

 

En contemplant ces étendues de désolation, je tentais d’imaginer la vie de ces déracinés, ces visages que j’ai pu rencontrer dans les provinces, et qui se retrouvent ici, où la Pachamama n’est plus qu’un ingrat désert de sable qui s’élève en tourbillons, loin de leur famille, loin de leur divin Soleil, loin du lopin de terre qui leur permettait de survivre. Ici, survivre est encore plus difficile, dans ce désert sans couleurs, dans cette jungle qu’est Lima, et dont ils ne connaissent pas les règles, où ils sont objet de mépris. La honte aux tripes, la honte de ce qu’ils sont. Ce qu’ils trouvent ici est bien pire que ce qu’ils ont quitté… Pourquoi, mais pourquoi viennent-ils ? La rencontre avec les serranos, les gens de la montagne, m’a tellement bouleversée, je trouve leur monde si dur, mais si beau, leurs coutumes si riches, que j’ai du mal à comprendre et accepter cet exil plus ou moins volontaire. Qu’espèrent-ils trouver ? J’imaginais les rêves qui les animent en quittant leur province, et la déception qu’ils doivent éprouver en arrivant là. Et c’est trop tard pour revenir en arrière… la chacra est vendue… Les parents se sacrifient, dans l’espoir que leurs enfants puissent aller à l’école, et qu’au fil des générations ils accèdent à de meilleures conditions de vie. Mais quelle vie ?

 

Fe y Alegría a installé un collège dans cette zone où il n’y avait rien de prévu en matière d’éducation. Ce sont les habitants qui ont demandé que FyA s’installe ici. Comme chaque fois qu’ils s’installent dans une invasión, FyA n’achète pas le terrain, mais envahit, comme les autres, un terrain qui leur est octroyé par la communauté. Ils régularisent la situation avec l’Etat par la suite. Pour l’instant quelques salles de classe seulement sont construites, ainsi qu’une clôture, installée par les parents d’élèves. En ce moment, ils sont en train d’élever des murs à l’intérieur même du collège, pour stopper le sable qui envahit le terrain de basket. Le collège est en effet construit sur une dune, surplombant la mer et Pachacutec. C’est désespérant. Pas un rayon de soleil ne vient déguiser cet étalage de misère grisâtre. Au moins on voit les choses telles qu’elles sont : non, la misère n’est pas belle.

Les toilettes du collège de Pachacutec... à l'écart.

 

Ce même jour, Jesús m’a emmenée voir un autre collège FyA, dans le même secteur. Le collège FyA « Mi Perú » a une trentaine d’années. En trente ans, quel chemin parcouru ! Le Fya Est une tache de couleur au milieu de la grisaille. A l’intérieur, tout est peint de couleurs vives, et la directrice me fait remarquer l’importance des arbres (et des oiseaux) pour offrir aux élèves un cadre de vie un peu plus serein dans cet environnement sinistre. Le collège a un atelier de menuiserie. Tout le mobilier de l’établissement a été fabriqué par les élèves dans le cadre de leurs études. De même, l’atelier de couture confectionne les uniformes. Dernier équipement en date : une salle informatique reliée à internet. Le problème, c’est que pour l’instant ils n’ont pas suffisamment de professeurs pour la faire fonctionner.

 

Le collège FyA, seule tache de verdure au milieu du désert...

Dans ces deux collèges, celui qui a de la bouteille et celui qui vient d’ouvrir, j’ai rencontré des bénévoles espagnoles. Chapeau les filles. OK elles n’étaient là que pour un mois (il y avait aussi une française, venue en coopé il y a dix ans, et qui est restée), mais pour l’instant je me sens incapable de travailler là. Au moins, à Ayacucho, le soleil fait la nique à toutes les horreurs qu’Ismaëlle a dû écouter. A Pachacutec, le ciel aussi déprime… et quand le ciel est sous Prozac, moi je ne tiens pas le coup longtemps.

 

Cela s’apprend peut-être ?  

 
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12 septembre 2005 1 12 /09 /septembre /2005 00:00

LIMA, c’est aussi, enfin, et surtout, des visages auxquels je me suis attachée. Fort. A cause d’eux, malgré ce ciel si bas (qu’il fait l’humilité, dirait le grand Jacques ; « l’humidité » serait plus liménien), j’étais contente chaque fois que mes pérégrinations me faisaient passer par Lima.

 

C’est, à Pueblo Libre, Chelita, l’amie de Hildy (elles étaient ensemble à la fac à San Marcos), qui m’a accueillie les bras ouverts à mon arrivée, sans même me connaître, et tout de suite maternée.

C’est, à Lima Lima, Hildy, Chema, et leurs deux petites princesses, Ainara et Irati, ces amis de Miguel que j’avais rencontrés à Séville l’année dernière, et qui, à peine réinstallés à  Lima, m’ont accueillie dans leur maison comme une fille supplémentaire et une amie. Ahhhhhh…. rêver de projets théâtraux avec Hildy sur le coin de la table de la cuisine…

 

Chela e Hildy

 

 

 

Ce sont aussi Jairo et Hely, Pancho et Maria, Oscar, Cecilia, Claudia et l’autre Oscar, et j’en oublie certainement, la joyeuse bande de doux dingues du non moins doux dingue Miguel, avec qui j’ai passé de chaleureux moments de rigolade irrigués de Pisco, de Paita à Lima. 

 

C’est Jairo, encore une fois, qui me présente son papa, Felipe Rivas, Monsieur Marionnettes au Pérou, qui m’initie à l’histoire des marionnettes et des masques en Amérique Latine.  

 

Ce sont Juan, et ces trois couples de l’Agustino, qui buvaient du vin doux pour mieux pénétrer les raisons pour lesquelles Ismaëlle ne pouvait parler, tout en gardant un respectueux silence très expressif, qui manifestait à la fois leur incompréhension et leur bonne volonté pour comprendre… 

 

C’est Rodrigo, son inaltérable bonne humeur, et ses innombrables questions sur la France, Cuba, le monde entier, la politique, le Pérou sous toutes ses coutures… 

 

C’est, à San Borja, Lady, cette fille-mère de 24 ans, qui était ma voisine dans le bus de Jaén à Lima, fin juillet. Jamais 16 heures de transport n’avaient passé aussi vite. Cette jeune femme est incroyable. Prends soin de ton petit Rafaël, ma belle.

 

 

 

 

Ce sont, à Breña, mes grands frères du Juniorado, et Paca, la cuisinière, et Justo, le réceptionniste. Breña est mal famé, certains chauffeurs se signent en entrant dans le quartier paraît-il, et ses pickpockets sont réputés. Pour moi, Breña c’était un nid d’amitié joyeuse, le cocon où je venais prendre un peu de repos et des forces au milieu de mes errances. J’y ai beaucoup ri, j’y ai beaucoup appris, reçu tant de marques d’amitié… Là-bas on m’a particulièrement encouragée, réconfortée, fait confiance, tant au niveau collectif (une nénette au milieu des jez, ça n’allait pas de soi), qu’individuel (merci pour toutes les confidences reçues des uns et des autres), bref je m’y sentais bien. Merci en particulier à ceux qui m’ont ouvert leur jardin secret, fait part de leurs rêves, de leurs inquiétudes, de leurs difficultés. Vos fragilités sont si belles…

A Breña, encore, il y avait Raúl, le marionnettiste lunaire et souriant, et son espèce d’extraterrestre poilu qui a fait connaissance avec Ismaëlle. Il devait m’emmener voir la troupe Cusi-Cusi, et me présenter son collègue Martín, avec qui je correspondais avant d’arriver au pays. Je n’ai pas eu le temps. Décidément, il me reste beaucoup de choses à faire dans ce pays…

 

 

 

 

Lima, ce sont enfin tous ces chauffeurs de taxi, venus des quatre coins du pays. Le premier contact est toujours un peu méfiant, on négocie la course avec le plus d’assurance possible, on s’installe… et rapidement on discute. On finit toujours avec un abrazo ou un bisou. Je me rappelle de celui qui venait de Cangallo ; de celui qui venait de Huanta ; de celui qui râlait contre le soleil en août à Lima (c’est pas normal, ça annonce un temps pourri pour la suite) ; de celui qui sait que quand les habitants d’Ayacucho adoptent quelqu’un, ils le protègent toutes griffes dehors, et qu’on ne peut pas même l’effleurer avec un pétale de rose ; de celui qui m’invite à venir visiter sa province, dans la Selva ; de celui qui s’étonne qu’on ne m’ait rien fait voler et jamais agressée ; de ce tout jeune chauffeur de 20 ans, le visage strié de cicatrices, ancien pandillero, repenti, qui travaille comme un dingue pour faire vivre sa femme et son petit bébé, sa petite famille dont il parle avec émotion ; de celui qui m’a emmenée à l’aéroport pour confirmer mon billet, de sa sollicitude ; de celui qui s’est énervé contre ceux qui conduisent mal (c’est-à-dire tout le monde… dans ce pays, il est VITAL de conduire hors-la-loi) ; de celui qui a attendu ¾ d’heure avec moi devant le Juniorado, à 8h du mat’, que quelqu’un vienne m’ouvrir… Quand les liméniens parlent des chauffeurs de taxis, ce sont toujours de potentiels voleurs, agresseurs, violeurs, assassins… Peut-être. En tout cas aujourd’hui je suis bien là, et je leur dois de bien agréables tête-à-tête. Chau, maestro.

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12 septembre 2005 1 12 /09 /septembre /2005 00:00

Et voilà.

Il a fallu dire au revoir. A Ayacucho, expliquer aux enfants que dans deux ans Ismaela viendra voir s’ils ont grandi… Embrasser Vilma, la secrétaire, Victor, l’extraordinaire gardien, les professeurs, en particulier Yacki, avec qui nous avons traversé les jours difficiles de la mort de Liseth. Embrasser Flor, la femme de Victor, qui se met à pleurer en me faisant des recommandations… « On s’était habitués à te voir arriver le matin… » Ay, Flor, ne pleure pas, je t’en prie, c’est déjà difficile. Sortir du collège sans se retourner, émue par Flor. Deux enfants me rattrapent, je ravale les larmes qui allaient s’échapper. Je quitte le collège en discutant avec eux, Ismaëlle sur le dos. Un salut aux femmes qui vendent des bonbons à l’entrée. Prendre la combi 18, pour la dernière fois cette année.

Dire au revoir à Luzmila en montant dans le car. Sans mots. Pas besoin. Chacune avec un grand sourire sur les lèvres, un peu trop grand ce sourire, qui dit tout ce que la pudeur nous empêche d’exprimer. « Fais pas trop de bêtises, mauvaise fille ! ». Ha. Pucha, bon vent Luzmila, bon courage, et de la chance, il en faut.

A Lima, nouvelle série d’au revoirs, qui s’étalent sur 5 jours. Une fois de plus dire au revoir à Miguel, une fois de plus. Aux juniors. A Pancho. A Reynaldo. A Hildy et aux filles. Ainara qui s’accroche à la porte du taxi en pleurant… N’oublie pas, chica, le caillou magique donne des bisous quand on est triste !!!

Et puis je suis partie en ratant Felipe, Evaristo, Jesús, Chema, Chela, Juan-Carlos, Lady, Luisito, Yonicito à qui je n’ai pas pu dire au revoir… Pincement au cœur.

 

Le taxi. L’aéroport, en essayant de penser davantage à ceux qui m’attendent qu’à ceux que je laisse derrière moi, pour me donner du courage. J’ai fait à cette terre, ma seconde patrie, la promesse de revenir. Dans 2 ans si tout se passe bien, et pour un certain temps. Pour l’instant, il faut rentrer, retrouver ma famille et mes amis, qui m’ont manqué, terminer ce que j’ai à terminer en France, digérer cette première rencontre avec le Pérou, mettre en branle les projets réveillés par ce voyage… 

 

Avec Ismaëlle à mes côtés, complice silencieuse, mémoire-vive de toutes les confidences reçues.

(Isma qui, soit dit en passant, m'a fait une frayeur à l'aéroport, car ses parties métalliques nous ont valu une visite en règle des bagages. Heureusement, en voyant sa bouille, le douanier a souri : "Oh qu'elle est mignonne !... vous pouvez y aller. Bon voyage mademoiselle !).

 

Je suis rentrée, j’ai dû me réhabituer au clavier AZERTY, réapprendre tous les codes oubliés (carte bleue, digicode, téléphone etc…), je n’ai plus de puces, j’apprécie le silence (autant que le bordel péruvien me manque), je réfléchis à l’organisation de mon année, au fond de ma grotte, en sirotant du Pisco, je m’empiffre de fromage, redécouvre qu’il y a beaucoup de choses que j’aime à Paris, je passe du temps avec mes proches, j’apprends, avec consternation parfois, tout ce qui s’est passé cet été. Bref, un retour. 

 

Pas de déprime post atterrissage, cette fois. J’ai trop à faire, et ma promesse est ferme comme une décision. Et puis j’éprouve une sorte de soulagement, l’impression qu’il y a enfin un pont entre mes deux patries, ma terre natale, et celle qui vient de m’adopter, avec Ismaela.

 

 

 

 

 
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8 septembre 2005 4 08 /09 /septembre /2005 00:00

J’AI PEU PARLE de Lima, et pourtant j’y ai séjourné cinq fois au gré de mes errances péruviennes.

J’y suis arrivée fin juin, saisie par le froid et l’humidité, écrasée par un ciel épais et gris, presque autant que mes états d’âme, la gorge et le nez irrités par les gaz d’échappement des véhicules liméniens qui ignorent le contrôle technique. La bullía limeña, c’est le bordel.

Je suis arrivée de nuit. Miguel m’attendait et nous avons tout de suite sauté dans la voiture, il ne fait pas bon s’attarder à l’aéroport. L’émotion des retrouvailles tant attendues, celle de fouler pour la première fois le sol de ma patrie d’adoption, ajoutées à la fatigue physique et morale d’un mois d’insomnie et de travail intensif me laissent des souvenirs étranges de cette première soirée liménienne. Je me rappelle les enseignes lumineuses clignotantes et l’agitation des avenues en entrant dans Lima, de la fraîcheur du bord de mer dans ce parc de Miraflores où il faisait tellement nuit qu’on ne distinguait presque pas l’océan, de la glace à la guanábana et à la maca con miel en surveillant du coin de l’œil la voiture avec mes valises, de l’impressionnante Huaca, de l’arrivée chez Chela où Hildy et les filles nous attendaient, de la collation d’Epoisse et de Chablis pour célébrer l’arrivée, de la plongée dans un sommeil agité, frigorifiée par l’humidité…

Je suis restée plus longtemps que prévu à Lima au début, car Ayacucho était en grève et les moyens de transport bloqués. Un peu de temps pour se reposer, donc, et explorer un peu la capitale, dont je ne percevais pas alors l’immensité.

Mes souvenirs de cette première semaine sont eux aussi plongés dans la garrúa, j’étais tellement fatiguée… Hildy et Miguel m’initient au choix des taxis, des bureaux de change, aux déplacements en combi, à la prudence en traversant la rue, à prendre quelques repères, à la chicha morada, à la papa à la huancaina, à la palta rellena, au pollo a la brasa.

Le second soir, Hildy et Chela m’emmènent au concert de la Sarita, fameux groupe de rock péruvien, dans le non moins fameux bar La Noche, à Barranco, haut lieu du Lima by night. Le chanteur est déchaîné et fait des bonds spectaculaires. J’étais fascinée par sa façon de bouger. Leur rock intègre aussi des instruments traditionnels : on a vu débarquer sur scène violoniste, harpiste et danzante de tijeras (cf. article sur les danses et masques, qui arrivera dans les prochains jours), bel exemple d’un métissage qui ne va pas de soi dans ce pays, j’ai pu m’en rendre compte par la suite.

Un autre soir, nous sommes allés voir Sin Título, les dernier spectacle des Yuyachkani. Miguel me l’avait promis, depuis ces temps lointains où nous parlions de Teresa Ralli et d’Antigona, et j’attendais cela avec impatience… Je n’ai pas été déçue. Mais je n’y reviens pas, je l’ai déjà raconté au tout début. Ou plutôt, j’y reviendrai. Plus tard. Je ferai sûrement un stage là-bas un de ces quatre.

De Lima, mon guide préféré m’a fait découvrir Lima Centro, Barranco, Rímac, el Agustino. Moi j’avais l’impression que tout était loin. On ne peut rien faire à pied, il faut toujours prendre combis ou taxis… J’ai découvert plus tard qu’en fait on était restés dans le centre ! Lima est une ville horizontale, il n’y a presque pas d’immeubles mais des étendues de maisons à un ou deux étages. D’où la superficie.

Dans Lima Centro, le Jirón de la Unión, principale artère piétonne de la capitale, relie la Plaza San Martin (avec, sur le socle de la statue équestre du libérateur, la fameuse statue couronnée… d’un lama : le chef de travaux hispano avait commandé « una llama » sur la tête de la statue qui symbolise la liberté ; pour un Espagnol, c’est clair, c’est « une flamme » ; oui mais au Pérou, llama c’est aussi notre bon vieux lama, cracheur ou pas, et c’est ainsi que les artisans l’ont compris ; donc, définitivement, au Pérou, la liberté porte un lama sur la tête) à la Plaza de Armas, bordée d’édifices néo-coloniaux aux murs d’un jaune intense et aux balcons de bois noir. La cathédrale en impose certes, mais semble presque petite à côté du Palais présidentiel. Une jolie Place d’Armes, comme seule l’Amérique latine sait en faire. Ne manque que le soleil, dans la brumeuse Lima. Les liméniens disent que tout ce qui passe par le Jirón de la Unión fait le Pérou. C’est peu être un peu réducteur… ça reviendrait à dire que tout ce qui passe par Les Halles fait la France. Mais il est vrai que la foule dense et hétéroclite des cholos qu’on croise dans cette rue offre un panel assez représentatif des visages qu’on peut croiser dans le pays. Sachez que si vous chercher un pierceur, vous trouverez votre affaire dans ce secteur. Je crois que je n’ai jamais vu autant de perforés de ma vie.

En traversant le fleuve ( ??? … il y a bien un pont… mais le fleuve était à sec, c’est l’hiver), on arrive dans le quartier Rímac, du nom du fleuve (Rímac en quechua signifie « qui parle », car il paraît que lorsque le fleuve est en eaux, il fait bruyamment rouler les pierres). C’est l’ancien quartier chic de Lima. Aujourd’hui, il est presque plus facile d’imaginer le lustre qu’il a eu jusque dans les années 50 en écoutant les chansons de Chabuca Granda qu’en s’y rendant pour de vrai… Et pourtant si, les murs noircis et délabrés laissent deviner les couleurs vives, et on peut imaginer que de gracieuses coquettes épient les passants, en riant derrière leurs jalousies de bois. Aujourd’hui, Rímac est bien pauvre, et mal famé. On dirait La Havane, avec ces anciennes demeures splendides aujourd’hui compartimentées en petits appartements insalubres où cohabitent plusieurs familles, avec des tripotées d’enfants dans les escaliers. Mais on a traversé le quartier en chantonnant cette jolie chanson, symbole de la Lima du temps jadis, cela le transfigure…

  

Déjame que te cuente, Limeña,

Déjame que te diga la gloria

Del ensueño que evoca la memoria,

Del viejo puente, del río y de la Alameda.

Déjame que te cuente, Limeña,

Ahora que aún perfume el recuerdo,

Ahora que aún se mecen en un sueño

El viejo puente, el río y la Alameda.

 

Jazmines en el pelo y rosas en la cara,

Airosa caminaba

La Flor de Canela

Derramaba lisura y a su paso dejaba

Aromas de mixtura

 Que en el pecho llevaba.

 Del puente a la Alameda

 

 

 

 

 

 

A menudo bien la lleva

Por la vereda que se estremece

Al ritmo de su cadera

Recogía la risa de la brisa del río

Y al viento la lanzaba

Del puente a la Alameda.  

 

 

Déjame que te cuente Limeño

 Ay deja que te diga,

Moreno, mi pensamiento.

 

A ver si así despiertas del sueño

Del sueño que entretiene

Moreno, tu sentimiento

Aspira de la lisura

Que da la Flor de Canela

Adornala con jazmines

Matizando su hermosura

Alfombra del nuevo puente a la Alameda

Que el rio acompasara

Su paso por la vereda

Y recuerda que...

Jazmines en el pelo etc...

 Et nous sommes arrivés sur la fameuse Alameda, cette promenade plantée par Pizarro pour sa maîtresse métisse (je ne me souviens plus du nom de la belle). Pour que cette dernière puisse assister aux corridas où sa présence était interdite, le conquistador avait fait construire une tour à sa maison. Je ne sais plus comment cette histoire a fini. Tragiquement, je suppose…

Autre quartier pour lequel j’ai une affection particulière, Barranco. Pas étonnant, c’est fait pour. Pour vous faire une idée, si el Jirón de la Unión c’est Les Halles, Barranco, ce serait plutôt Montmartre. J’y étais venue de nuit pour le concert de la Sarita. Au coucher du soleil c’est encore mieux. J’aurais aimé retourner y flâner avant de repartir, je n’ai pas eu le temps. La prochaine fois. Des maisons de couleur, en bois ( ??? du moins dans mon souvenir), avec balcons, escaliers, étagées à flanc de colline, le long de ruelles qui descendent vers l’océan. Un peu de vent, l’air plus agréable que dans le centre. Traversant el Puente de los Suspiros (il y a un truc à faire avec ce pont « des soupirs » pour que les vœux se réalisent, mais j’ai oublié quoi… pas étonnant…), nous sommes allés en pèlerinage auprès de la statue de Chabuca Grande, qui a vécu dans le quartier. Miguel m’a fait prendre en photo toutes les maisons du quartier car il ne se souvenait plus dans laquelle elle avait vécu… tout ça pour apprendre finalement que c’était la grand-mère de Chabuca Grande qui habitait là ! (heureusement, la chanteuse y venait quand même en vacances régulièrement… sinon je virais mon guide, eh ho, faut pas me raconter n’importe quoi, non mais !).

Au bout de quelques jours j’ai fait mes premières sorties autonomes pour aller visiter les musées de Pueblo Libre, le quartier de Chela : Museo Larco et Museo Arqueológico. Le Museo Larco est célèbre pour ses céramiques érotiques (c’est fou tout ce qu’on peut faire sur une jarre à chicha !) mais ce le plus impressionnant, ce sont les enfilades d’étagères du magasin qui, chose exceptionnelle dans un musée, est accessible au public. On y voit des milliers et des milliers de céramiques qui ne sont pas exposées dans les vitrines, toutes plus belles les unes que les autres, dans un état de conservation surprenant.

Le Museo Arquelógico est une splendeur. L’édifice lui-même est un beau palais colonial, envahi de cohortes d’écoliers venus illustrer leurs cours d’histoire. A l’intérieur le parcours permet de se repérer dans la complexe histoire du Pérou : Chimu, Moche, Huari, Inca, Paracas… à cette époque-là je mélangeais vraiment tout. Pour les petits péruviens cela doit être un véritable casse-tête. A côté, nos dynasties médiévales, c’est du pipeau. C’est là, parmi les tissages, les momies, les poteries, les bijoux, que j’ai retrouvé la statue de l’Homme à l’Oreille cassée que je vous avais présentée il y a quelques semaines.

 

 

Plus tard dans mon séjour, j’ai pu visiter San Pedro, la grande église jésuite, qui leur a été confisquée lorsque l’ordre a disparu, et dont la jouissance leur a à nouveau été octroyée. J’ai eu la chance d’y entrer avec un jez (merci Oscar !), donc on a eu accès même aux parties interdites (vous vous doutez bien que c’est les plus intéressantes, bien sûr). San Pedro est d’un baroque relativement sobre, peu doré.

Une splendeur, ce que j’ai vu de plus beau à Lima, je crois : le couvent San Francisco. Les franciscains ont apporté là ce qu’on trouve de plus beau en Espagne : patio, azulejos, boiseries. Il faut voir la bibliothèque, et les arabesques de cette sublime voûte en bois dans l’escalier principal. Dans les souterrains on peut visiter les catacombes. Le conservateur des lieux a visiblement des crises de maniaquerie légèrement macabre : tous les ossements y sont classés par nature et par taille. On a ainsi des casiers remplis de crânes, d’autres pleins de fémurs, d’autres de métacarpes… Dans une des pièces, il y a même une sorte de rosace faite entièrement avec des crânes humains. Je n’ai pas pris de photo. Paix à leur âme.

Autre endroit sympa pour les amateurs de frissons : le Musée de l’Inquisition. Vous y trouverez en grandeur nature la reproduction des charmants supplices inventés pour lutter contre la sorcellerie sur le continent.  

 

Lima n’est pas si laide qu’on se plaît à le dire. C’est le manque de soleil qui la rend triste. Mais dès qu’il fait nuit, on se croirait en été !

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4 septembre 2005 7 04 /09 /septembre /2005 00:00

 

VOUS VOUS RAPPELEZ ? Cette Caminata por la Paz, randonnée de 2.200 km sur le Capac Nam, chemin de l’Inca, qui traverse le Pérou du Nord au Sud pour célébrer le second anniversaire de la publication des travaux de la Commission de la Vérité et rappeler qu’aucune des recommandations n’a été suivie d’effets… Felipe, Abel, Aydee et Nilo, les quatre Chasquis, ont commencé à la frontière avec l’Ecuateur le 1er mai, et sont arrivés à Desaguadero, à la frontière bolivienne, le 25 août. Je les avais rencontrés à Ayacucho lors de leur passage le 20 juillet, puis j’ai marché quelques jours avec eux, du 8 au 12 août, dans la province de Cuzco. Il était donc logique que je me rende au Campo de Marte (Champs de Mars) dès mon retour à Lima le 26 août pour la grande fête du second anniversaire de la CVR.

Je m’y suis rendue avec la bande de jez avec qui j’avais randonné, Reynaldo, Victor, Miguel etc... C’était à 18h, il faisait déjà nuit. Il y avait beaucoup de monde, plus que l’année dernière paraît-il, mais mes amis étaient déçus, ils attendaient encore plus. On pouvait effectivement espérer davantage de monde, puisque la Caminata avait traversé le pays entier, dans le but justement de sensibiliser la population et de ne pas laisser les plaies pourrir dans l’oubli. On avait là une preuve, s’il en fallait encore, qu’il nous reste du pain sur la planche pour les années à venir… Sur le Champ de Mars, rebaptisé désormais Campo de la Paz, la Defensoria del Pueblo avait installé des estrades avec des spots : sur la grande scène du milieu se produisaient musiciens traditionnels et chanteurs, pour un concert rassemblant tous les types de musiques traditionnels du Pérou, de toutes les régions ; sur les podiums plus petits, de part et d’autre, étaient accrochés les milliers de quipus de toutes les couleurs récoltés par les chasquis sur leur chemin. Des milliers de quipus, des centaines de milliers de nœuds, un pour chaque victime de la guerre civile : 70.000 morts et disparus, des milliers d’estropiés, de veuves, d’orphelins, de malades mentaux, de familles déplacées…

Des délégations de diverses ONG, associations, universités, collèges, écoles, paroisses, des représentants des provinces, de certaines communautés indigènes, ont défilé sur la scène avec leurs banderoles, et leurs quipus sont venus s’ajouter à ceux déjà nombreux accrochés sur les podiums. Le défilé a duré longtemps, c’était impressionnant de voir autant de personnes mobilisées, et à la fin il y avait des quipus partout, même sur les rambardes de sécurité, ou suspendus entre deux rangées de spots… En fait je crois que la majorité des personnes présentes ce soir là étaient des militants de diverses associations pour la Paix. Leur nombre en est impressionnant, mais je comprends mal alors pourquoi la mobilisation ne fait pas tâche d’huile, pourquoi tout Lima n’était pas sur le Champ de Mars. Enfin, si je comprends. J’ai bien vu à Ayacucho le malaise, le silence, la difficulté à rappeler ces situations face auxquelles pour la plupart le deuil et le pardon sont encore complètement impossibles…

J’ai dû partir vers 20.00 pour une autre fête, plus intime celle-là, chez Hildy, à l’occasion du départ de Miguel qui rentrait le lendemain aux Etats-Unis. On m’a raconté ensuite que les chasquis ont été appelés sur l’estrade et ont été longuement applaudis. Ils ont parlé chacun leur tour de l’expérience qu’ils venaient de vivre. Celle qui a le plus touché les gens, c’est Aydee, bien sûr, cette jeune femme d’Ayacucho aux yeux de lumière, celle qui m’avait le plus impressionnée pendant la Caminata. J’aurais vraiment aimé rester en contact avec elle (ce n’est pas complètement perdu, normalement Rey a son mail). Avec ses mots simples et improvisés, sans idéologie, sans grandiloquence, elle a évoqué les rencontres, les visages croisés sur ce chemin qui lui a permis de relier sa tragédie familiale à celle de milliers d’autres…

L’aventure de la Caminata por la Paz est terminée. Espérons que maintenant commence le lent et difficile labeur quotidien de la mise en application des recommandations de la Commission de la Vérité et de la Réconciliation…

 
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24 août 2005 3 24 /08 /août /2005 00:00

VOICI quelques unes des actuces que j´ai pu observer lors de mon petit parcours... Papa ça va te plaire.

Arrosage par aspersion (méthode Victor, le gardien Géo Trouvetout du collège) : Prenez une bouteille d´Inca-Kola de deux litres (ca marche aussi avec Coca ou Pepsi, je suppose), dans le goulot de laquelle vous introduisez un tuyau d´arrosage, que vous calez dans l´orifice avec ce que vous avez sous la main, papier journal, PQ, dans le meilleur des cas, mastic, colle... Quand votre bouteille est pleine d´eau à saturer, prenez un clou, et percez votre bouteille, soit en ligne, si vous voulez un arrosage unidirectionnel, soit de part et d´autre de la bouteille, si vous voulez arroser plus large. Attention, la portée des jets diminue selon le nombre de trous. Pensez à caler votre bouteille avec quelques pierres, pour que l´effet n´en soit pas perdu. Technique utilisée pour arroser la cour, non pas pour faire pousser une pelouse inexistante, mais pour neutraliser la poussière pendant quelques heures...

 

 

Autre seconde vie possible pour une bouteille de gaseosa : le monte-bouteille en bord de route. Lorsque vous prenez le car, si vous ne vous méfiez pas lors d´une halte, vous allez vous retrouver nez à nez avec un truc qui se ballade devant votre fenêtre, facon tête de copine de Marie-Antoinette. C´est ce qu´utilise une armée de femmes et d´enfants qui passent leur journée au bord des routes pour vendre des boissons aux passagers des cars. Un monte-bouteille en quelque sorte. Je désigne ainsi la demi bouteille de gaseosa de deux litres (coupée à mi-hauteur) dans le goulot de laquelle est enfoncé un manche à balai, la pauvre... Et dans laquelle les petites marchandes disposent des petites bouteilles d´eau ou d´Inca-Kola. Si vous en voulez, vous tapez à votre fenêtre, vous l´ouvrez, vous attrapez ladite bouteille et déposez en échange dans la martyre emmanchée une pièce d´un sol.

 

Ojotas : Un classique péruvien, las ojotas. Ce sont ces sandales à 2 soles confectionnées avec des chutes de chambre à air. Pour les filles, elles peuvent être décorées de petites fleurs de couleur découpées dans des morceaux de plastique. C´est la chaussure nationale, celle que portent tous les paysans du pays. C´est également ce qu´on utilise pour danser les danses traditionnelles. J´ai testé pour vous, à l´occasion de la fête de l´école. C´est relativement confortable, mais ca noircit les pieds. L´avantage à Ayacucho c´est qu´il y a tellement de poussière qu´entre la partie du pied noircie par la poussière et celle qui est noircie par les ojotas, on obtient une couleur relativement homogène…

La canette souple : si votre main souffre du contact rigide de la paume avec une canette en métal, adoptez la canette péruvienne : un sachet plastique noué autour d´une paille, dans lequel vous transporterez votre précieux Inca-Kola doré. Surtout, ne relâchez jamais la prise, car si la pochette s´ouvre dans la combi, c´est la catastrophe. Peut procurer des crampes tenaces.

 

 

 

 

Les pompons des pompom girls : faites une touffe de pochettes plastiques de différentes couleurs, que vous nouez d´un côté avec un bout de cordellette. Découpez dedans des bandelettes régulières à l´aide de ciseaux. Vous obtenez de délicieux pompons bruissants pour encourager votre équipe favorite de foot (pour les garcons) ou de volley (pour les filles)...

Dispositif de Haute Sécurité :  Chacun le sait, le Pérou est un pays dangereux, très dangereux. A vrai dire, je ne l´ai pas vraiment senti, mais les gens ici en sont hautement convaincus. « Comment, tu prends le taxi toute seule ! Mais tu sais que la semaine dernière un chauffeur de taxi a violé / étranglé / torturé une demi douzaine de jeunes femmes etc… »  Bon, c´est vrai qu´en ville surtout, tout peut arriver, et on ne peut pas vraiment compter sur la police – machisme oblige, une femme est forcément coupable de ce qui lui arrive. Les journaux télévisés et la presse entretiennent consciencieusement la psychose : bus de voyageurs pris d´assaut, viols, agressions à main armée, détournement de mineurs dans les boîtes d´internet… tout cela prend plus de place dans les feuilles de chou que l´actualité politique. Et même quand il ne s´est rien passé, on délaye pendant des heures sur ce qui aurait pu se passer… On connaît cela nous aussi. Plus ou moins. Ici, plus que moins. Toujours est-il que les péruviens se défendent. A Ayacucho, on peut acheter sur la Plaza de Armas (la bien nommée) armes blanches et armes à feu, artistiquement déposées sur des couvertures de couleur, en plein jour. Plus pacifiquement, on observe de Cusco à Ayacucho, de petits cactus sur le faîte des murs qui entourent les maisons, en guise de mise en garde contre d´éventuels voleurs – là encore, une énigme… qu´y a-t-il à voler aux Olivos ? A défaut d´être utile (je suppose qu´en un coup de machette on décapite la redoutable défense), c´est joli !

 

 

 

 

Autre technique de sécurisation de l´espace public (Sarko n´y a pas encore pensé…) : les pancartes d´intimidation. Vu à Calca (province de Cusco) début août, à l´occasion de la fête du village, des villageois clouant sur les murs des maisons entourant la place principale, des affiches sur lesquelles on pouvait lire, en gros caractères noirs : « Ladrón, si te cojo, vas a pasar un mal momento », « Ladrón visto es ladrón muerto »… et autres amabilités, grosso modo le message est « Voleur, si je t´attrape je te tue ». Au début, on a cru que cela s´adressait aux personnes qui habitaient dans les maisons sur lesquelles on clouait les pancartes, c´était violent… Mais après éclaircissement, nous sommes rentrés nous coucher rassurés (nous dormions dans une de ces maisons, justement). Je ne suis pas restée assez longtemps pour savoir si cette technique préventive est efficace.  

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24 août 2005 3 24 /08 /août /2005 00:00

La plus célèbre... parfois on l´appelle manta cusqueña (de Cusco) mais je crois qu´en fait ce sont des motif du Sud, vers Puno et la frontière avec la Bolivie. A vérifier.

Bientôt je vous mets une photo d´un véritable anaranjado cusquenien...

 

Manta Piurana (de Piura, dans le Nord).

Manta Norteña (de chez Luzmila)

Manta de Huanta (petite ville de la province d´Ayacucho).

Manta Huamanguina (de "chez moi", Ayacucho). Couverture tissée, à rayures, fabriquée dans la campagne ou en prison: La broderie du centre est faite dans le marché même. Le prix dela couverture varie selon la broderie, les couleurs utilisées, les motifs...

Manta Huancaina (de Huancayo), ma préférée (c´est celle d´Isma)

 

 
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22 août 2005 1 22 /08 /août /2005 00:00

 

UNE SEMAINE de fête au Colegio Fe y Alegría d´Ayacucho. Nous célébrons le sixième anniversaire de l´ouverture du collège à Ayacucho.

 Jeudi, matinée sportive : Foot pour les garcons, volley-ball pour les filles. Pour proclamer l´ouverture des festivités, après un petit discours de Luzmila pour ses élèves, on fait éclater des ballons de baudruche, on crie, on applaudit. On se croirait aux JO.

 Les pom-pom girls, équipées de pompons en pochettes plastiques de différentes couleurs dans lesquelles elles ont découpé des lanières. D´autres en ont fabriqué en papier journal.

Vendredi matin, défilé dans les rues du quartier, pour avertir les voisins qu´on fait la fête. Elèves et professeurs ont confectionné de nombreuses banderoles avec plein de messages enthousiastes.

Fe y Alegría, où les rêves sont pris en compte.

Vendredi après-midi, répétition des numéros pour la fête de dimanche.

 

Mise en place de l´exposition d´artisanat des différents clubs.

 

 

 

 Dimanche. Ouverture de la fête avec le salut au drapeau.

 

On entonne l´hymne à plein poumons : "Somos libres..."

 Les plus grands... parfois des petits branleurs, mais pour les danses, ils assurent !

 

 

Tous étaient super fiers d´arborer un costume spécialement préparé ou loué (5 soles) pour l´occasion.

Les danses que les élèves nous ont présenté sont les danses de la campagne, et leurs mouvements sont inspirés des scènes de la vie quotidienne.

 

L´atelier théâtre de la profesora Mayli a présenté l´histoire du Joueur de Flûte, version andine : ici l´entrée des petits rats, qui viennent dévorer le maïs des paysans. Ils ne sont pas craquants ?

 

Le club gymnastique, avec carambolage de galipettes (ils ne regardaient jamais si le précédent avait fini avant de commencer la leur...)

Le petit orchestre rythmique, nouveauté 2005.

 

 

Les parents, pour une fois fiers de leur progéniture...

Les profs eux-mêmes ont payé de leur personne (votre servante au fond). Je peux vous confirmer que danser à toute allure à 2.850 mètre arrache les poumons.

Un gros câlin à sa directrice préférée...

 

 

 

 BRAVO LES LOULOUS !!!!

 

 
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